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ADOPTION DE LA DIRECTIVE CS3D SUR LE DEVOIR DE VIGILANCE, UNE REVOLUTION POUR LES ENTREPRISES FRANCAISES ?

ADOPTION DE LA DIRECTIVE CS3D SUR LE DEVOIR DE VIGILANCE, UNE REVOLUTION POUR LES ENTREPRISES FRANCAISES ?

Auteur : Camille MICHEL & Emeric JOLIVOT
Publié le : 27/06/2024 27 juin juin 06 2024

LE DEVOIR DE VIGILANCE, QU’EST-CE ?

Le devoir de vigilance impose aux sociétés dépassant un certain seuil, ainsi qu’à leurs partenaires, d’identifier les risques liés à leur activité afin de prévenir et de supprimer toutes conséquences dommageables sur les personnes et, plus globalement, sur leur environnement.

LE DEVOIR DE VIGILANCE, DEPUIS QUAND CELA EXISTE ?

Le devoir de vigilance trouve initialement son fondement dans un texte non-contraignant édicté par l’ONU en 2011.
Toutefois, suite au drame du Rana Plaza, la France a été pionnière en rendant ce devoir contraignant pour les sociétés mères et donneuses d’ordre françaises avec la promulgation d’une loi sur le devoir de vigilance en 2017. [1] La loi française impose donc déjà à certaines entreprises d’établir un plan de vigilance relatif aux activités de la société, de ses sous-traitant, fournisseurs, filiales ou sociétés qu'elle contrôle, propre à identifier les risques et à prévenir les atteintes graves envers les droits humains, les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l'environnement.

L’Union européenne s’est d’ailleurs largement inspirée de cette loi de 2017 pour rédiger la Directive CS3D adoptée définitivement par le Conseil européen en mai dernier.  

MAIS ALORS, QUELLES SONT LES NOUVEAUTÉS POUR LES ENTREPRISES FRANÇAISES ?  

Un champ d’application élargi

Les obligations contenues dans la directive s’appliqueront aux entreprises constituées conformément à la législation d’un Etat membre et remplissant différents critères alternatifs, à savoir :
  • Les entreprises et sociétés mères européennes employant plus de 1 000 salariés en moyenne et ayant réalisé un chiffre d’affaires net mondial supérieur à 450 millions d’euros lors du dernier exercice,
  • Les franchises dans l’Union européenne ayant réalisé un chiffre d’affaires net mondial supérieur à 450 millions d’euros lors du dernier exercice,
  • Les entreprises ayant conclu des accords de franchise ou de licence dans l’Union européenne, ayant réalisé un chiffre d’affaires mondial supérieur à 80 millions d’euros, si au moins 22,5 millions d’euros ont été générés par les redevances.
A titre comparatif, pour être soumise à la loi française sur le devoir de vigilance, la société doit employer au moins 5 000 salariés sur le territoire français ou 10 000 sur l’ensemble du territoire européen.

Une exemption prévue

La Directive prévoit également que la société mère dont l’activité principale est la détention d’actions dans des filiales opérationnelles et ne prenant pas part à la prise de décisions de gestion, opérationnelles ou financières qui touchent le groupe ou une ou plusieurs de ses filiales, peut être exemptée de l’exécution des obligations prévues par la Directive.
  • L’application des obligations de la Directive aux sociétés entrant dans les seuils mais également aux activités de ses filiales, partenaires commerciaux et autres entreprises composant la « chaîne d’activités »
Les sociétés assujetties au nouveau devoir de vigilance devront veiller à respecter elles-mêmes les obligations prévues par la Directive mais également à ce que ses filiales, partenaires commerciaux et autres sociétés composant la « chaîne d’activités » les respectent.

C’est particulièrement avec la notion de « chaîne d’activités » que les devoirs des sociétés assujetties s’élargissent.

En effet, la loi française prévoit déjà l’obligation de faire respecter le texte aux filiales, sociétés contrôlées, ainsi qu’aux activités des sous-traitants ou fournisseurs avec lesquels est entretenue une relation commerciale établie, lorsque ces activités sont rattachées à cette relation.

La Directive définit la « chaîne d’activités » comme comprenant toutes activités en amont en lien avec la production de biens ou la prestation de services auprès de la société assujettie mais également les activités en aval en lien avec la distribution, le transport ou le stockage d’un produit de l’entreprise assujettie, lorsque les partenaires commerciaux exercent ces activités pour cette dernière ou au nom de cette dernière. 
 

Un champ d’application matériel restreint en comparaison avec la loi française

Les obligations édictées par la Directive couvre moins de domaines que la loi française. En effet, la loi française vise tous les risques liés aux droits humain, libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l'environnement tandis que la Directive européenne se concentre aujourd’hui essentiellement en matière de droits de l’homme et d’environnement.
 

Un devoir de vigilance fondé « sur les risques »

La Directive l’affirme, « les États membres veillent à ce que les entreprises fassent preuve d’un devoir de vigilance en matière de droits de l’homme et d’environnement fondé sur les risques » et ce, notamment, en prenant les mesures suivantes :
  • Intégrer le devoir de vigilance dans leurs politiques et leurs systèmes de gestion des risques et ce, en élaborant un code de conduite décrivant les règles et principes à suivre mais surtout une description des mesures prises pour vérifier la bonne application dudit code de conduite, notamment chez les partenaires commerciaux,
  • Recenser et évaluer les incidences négatives réelles ou potentielles au moyen d’une cartographie des risques suivie d’une évaluation approfondie voire d’une hiérarchisation des risques,
  • Prévenir et atténuer les incidences négatives potentielles grâce à des plans d’action en matière de prévention assortis de calendriers raisonnables,
  • Mettre un terme aux incidences négatives réelles et en atténuer l’ampleur, avec si nécessaire une collaboration avec d’autres entreprises du même secteur afin de diminuer les incidences de façon globale,
  • Réparer les incidences négatives réelles,
  • Mener des échanges constructifs avec les parties prenantes à chaque étape du processus de vigilance, allant de la collecte d’information pour la cartographie des risques à la réparation des incidences négatives réelles,
  • Etablir et maintenir un mécanisme de notification et une procédure relative aux plaintes,
  • Contrôler l’efficacité de leur politique et de leurs mesures de vigilance, auprès de chaque partie prenante,
  • Communiquer publiquement sur le devoir de vigilance.
Par ailleurs, la lutte contre le changement climatique fait l’objet d’une attention toute particulière car la Directive impose aux entreprises assujetties de mettre en œuvre un plan de transition pour l’atténuation du changement climatique qui vise notamment à garantir la comptabilité de leur stratégie avec la limitation du réchauffement climatique à 1,5 °C conformément à l’accord de Paris, sans toutefois prévoir de sanctions particulières.

Création d’une autorité de contrôle

Il s’agit là d’une réelle nouveauté pour les entreprises françaises puisque, jusqu’alors, la loi ne prévoyait aucun organe de contrôle. Avec l’adoption de la Directive, une autorité de contrôle sera désormais chargée de vérifier la bonne application des obligations relatives au devoir de vigilance.

Un devoir sanctionné

Les nouvelles autorités de contrôle se voient confier plusieurs pouvoirs aux fins d’assurer l’effectivité de la Directive. Elles pourront, notamment, ordonner à l’entreprise de cesser les infractions, d’apporter une réparation proportionnée à l’infraction et nécessaire pour y mettre un terme ou encore saisir les autorités judiciaires compétentes.

Surtout, la Directive prévoit qu’il reviendra aux Etats-membres de déterminer le régime des sanctions, qui pourront être pécuniaire dont le plafond maximal est néanmoins fixé à 5% du chiffre d’affaires net mondial réalisé par l’entreprise.

Enfin, en cas de non-respect des règles, les sociétés seront responsables des dommages causés à des personnes tant physiques que morales, ce qui est d’ores-et-déjà le cas en France. Sauf, et fort heureusement, si le dommage a été causé par un de ses partenaires commerciaux dans sa chaîne d’activités.
 
[1] Loi n°2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre

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