EXPERIMENTATION DES TRIBUNAUX DES ACTIVITES ECONOMIQUES (TAE)
Publié le :
01/08/2024
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L’article 26 de la loi du 20 novembre 2023 d'orientation et de programmation du ministère de la Justice 2023-2027 prévoit, à titre expérimental, que le Tribunal de commerce est renommé Tribunal des activités économiques (TAE).
Les TAE connaitront de toutes les procédures relevant de la compétence du Tribunal de commerce et bénéficieront également de compétences étendues dans certains domaines.
L’essentiel à retenir :
La compétence des TAE est celle actuelle des Tribunaux de commerce.
En plus :
Actuellement, le tribunal compétent pour connaitre d’une procédure collective peut être soit le Tribunal de commerce si la société exerce une activité commerciale ou artisanale soit le Tribunal judiciaire pour les autres activités, notamment agricoles et civiles.
A titre expérimental, à compter du 1er janvier 2025 et pour une période de 4 ans, il n’y aura plus à distinguer de tribunal compétent selon la nature de l’activité. Le Tribunal des activités économiques (TAE) deviendra le seul (ou presque) compétent pour connaître des procédures amiables et collectives de tous les débiteurs, quel que soit leur statut ou leur activité.
Composition du TAE :
Le TAE sera composé de juges élus du Tribunal de commerce et de juges exerçant la profession d'exploitant agricole.
Durée de l’expérimentation :
Le nouvel arrêté prévoit que ces TAE seront expérimentés pour une durée de 4 ans qui commencera à courir à compter du 1er janvier 2025.
Procédures concernées :
Les procédures concernées par cette expérimentation seront celles introduites à compter du 1er janvier 2025.
Ainsi, les dispositions détaillées ci-dessous ne seront pas applicables aux procédures ouvertes avant ou en cours à cette date.
Les tribunaux désignés :
L’arrêté du 5 juillet 2024 relatif à l’expérimentation du Tribunal des activités économiques a désigné douze tribunaux de commerce qui seront concernés par les mesures détaillées ci-après, qui sont les suivants :
- Marseille ;
- Le Mans ;
- Limoges ;
- Lyon ;
- Nancy ;
- Avignon ;
- Auxerre ;
- Paris ;
- Saint-Brieuc ;
- Le Havre ;
- Nanterre ;
- Versailles.
Les TAE seront compétents pour connaître également des :
- Procédures d’alerte ;
- Procédures amiables (la demande de désignation d’un conciliateur devra être formulée auprès du Président du TAE) ;
- Procédures collectives ;
- Actions et contestations relatives aux baux commerciaux qui sont nées de la procédure collective et qui présentent avec celle-ci des liens de connexité suffisant (nous revenons sur ce point plus loin dans le propos).
Par conséquent, les nouveaux TAE connaîtront des procédures amiables et collectives jusqu’alors traitées par les tribunaux judiciaires et concernant notamment les débiteurs exerçant une activité agricole, les sociétés civiles, les associations, ou encore certains professionnels libéraux.
Rares exceptions à la compétence du TAE :
Après quelques protestations, certains professionnels libéraux, et notamment professionnels du droit ont obtenu d'échapper à la compétence de cette juridiction, entres autres, avocats, notaires, huissiers, greffiers de Tribunaux de commerce, administrateurs et mandataires judiciaires, etc.
Également, s’agissant de l’ouverture d’une procédure à l’égard d’un débiteur exerçant une activité agricole et qui n’est pas constitué sous la forme d’une société commerciale, le TAE n’est compétent pour ouvrir une procédure collective que si le président du TAE a été saisi, préalablement à l'assignation, d'une demande tendant à la désignation d'un conciliateur.
S’agissant du contentieux portant sur le sort du bail commercial en procédures collectives :
Comme précisé ci-dessus, le TAE saisi d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire connaîtrait de toutes les actions ou contestations relatives aux baux commerciaux nées de la procédure et qui présenteraient des liens de connexité suffisants avec ladite procédure.
L’attribution de cette compétence au TAE a pour objectif de simplifier la question de la compétence judiciaire pour connaître des problématiques liées à la situation du bail commercial en procédures collectives. De facto, ce contentieux est aujourd’hui éclaté entre plusieurs juridictions : le tribunal de la procédure collective (commercial ou judiciaire) se prononce sur les problématiques liées à la procédure collective, le Tribunal judiciaire est seul compétent pour constater l’acquisition de la clause résolutoire mais également le juge-commissaire est compétent pour se prononcer sur la poursuite du contrat de bail.
Ainsi, l’ensemble des questions relatives au traitement du bail commercial dans le cadre d’une procédure collective devraient désormais relever du TAE.
Cependant, cette compétence ne sera en rien automatique puisqu’il faudra encore que l’action ou la contestation relative au bail commercial soit née de la procédure collective et présente avec celle-ci des liens de connexité suffisants.
En réalité, ces conditions restrictives risquent davantage de déplacer le contentieux relatif à la compétence judiciaire sur la réunion et la qualification de ces conditions.
Mise en place d’une « contribution financière pour la justice économique »
Encore et toujours à titre expérimental, cette réforme prévoit l’instauration d’une contribution financière qui devra être versée par certains demandeurs pour chaque instance introduite devant le TAE, à peine d’irrecevabilité de la demande, qui pourra être prononcée d’office par le juge.
Le montant de ladite contribution sera fixé par un barème défini par décret en Conseil d'État. Le texte pose d’ores-et-déjà une limite de 5 % du montant des demandes cumulées au stade de l'acte introductif d'instance et pour un montant maximal de 100 000 euros. Ce barème devra tenir compte du montant des demandes initiales, de la nature du litige, de la capacité contributive de la partie demanderesse, appréciée en fonction de son chiffre d'affaires annuel moyen sur les trois dernières années, de ses bénéfices ou de son revenu fiscal de référence, et de sa qualité de personne physique ou morale.
Il est toutefois essentiel de préciser que cette contribution ne sera pas due par :
- le demandeur à l'ouverture d'une procédure amiable ou collective ;
- l'Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements ;
- les personnes physiques et les personnes morales de droit privé employant moins de 250 salariés.
Surtout, cette contribution a été validée par le Conseil constitutionnel [1], au motif qu’il s’agit d’une expérimentation dont l’objet mais également la durée ont été suffisamment définis et limités. L’inégalité de traitement entre les justiciables soumis à l’expérimentation et ceux qui ne le sont pas est justement la conséquence nécessaire de la mise en œuvre de cette expérimentation et se trouve donc justifiée.
[1] Cons. Const., décision n°2023-855 DC, 16 novembre 2023, Loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023
Historique
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